Les Révélations de Glaaki....

 

 

Des études, des analyses, des réflexions personnelles de nos collaborateurs sous cette première rubrique de Murmures. Et à tout seigneur tout honneur, les commentaires de Thierry DELUC sur une doctrine sulfureuse, celle de la Kabale (ou cabale ou encore Kabbala.....)

 

 

 

La Cabale

 

AVERTISSEMENT DE L’AUTEUR

 

Ce sujet ne laisse aucune place à l'imagination de celui qui le compose. Car il est impossible - si on se veut sérieux - de changer le sens et les définitions de la cabale originelle, à moins d'écrire sa propre "version". Mais ce n'est pas l'objectif de cet article. Ces pages sont avant tout une compilation rigoureuse et historique.

                Je tiens à redire que tout ce qui concerne la cabale perd bien souvent toute valeur significative dès sa traduction (Hébreu / autres langues).

                Qu'importe aux éditeurs spécialisés et aux auteurs maison sans scrupules ? Eux commercialisent...

                Résultat:

                Du haut de cet Himalaya de publications, on peut constater objectivement que 50% de ces ouvrages sont des phantasmes d' "auteurs" mégalos - voire fous - et que les autres 50% distillent plus ou moins quelques notions justes de cabale, afin de cautionner leurs "dons personnels", leurs "pouvoirs", leurs "découvertes", leurs "idéals de vie", qu'ils voudront bien partager avec vous à condition que vous fassiez au moins l'effort d'acheter ce qu'ils vous vendent.

                Si vous n'arrivez pas à égaler leurs puissances, même juste à en avoir un tout petit peu, c'est normal !!! Ou vous n'avez pas de dons (?), ou vous n'y avez pas consacré toute votre vie "comme eux" (?). En tout cas, c'est déjà trop tard pour vous, car vous n'avez plus votre argent non plus !

                Si j'ai voulu écrire cet article, c'est pour vous expliquer l'évolution historique de la cabale d'un ton neutre, de peur qu'un autre ne vous dessine des pentacles magiques à côté d'invocations rituelles imprononçables, qui dérangent les esprits fragiles et suicident les désespérés.

                En période de crise, les humains se rattrapent à n'importe quelle branche d'un quelconque Arbre de Vie... fut-il symbolique...

                Il ne vous reste plus qu'à envoyer vos réactions à la revue qui transmettra. Merci de votre compréhension.

 

   

 

 

Définition du dictionnaire:

 

CABALE (kabal) nom féminin (hébreu: qabbalah, tradition). Chez les juifs, interprétation mystique de la Bible. // Science occulte qui prétend faire communiquer avec les esprits: terme de cabale. // Menées secrètes, intrigue: monter une cabale.

 

(source: Petit Larousse illustré, 1977).

 

En littérature, vous trouverez le mot "cabale" sous forme écrite différente: Qabbale, Kabbale... C'est le même mot, le sens demeure identique, mais ces deux vocables sont plus exotiques, induisent le mystère plus sûrement. C'est tout.

                Vous connaissez tous cette phrase célèbre: "Au commencement, il y avait le Verbe..." Ce fameux verbe était en Hébreu. L'Hébreu est donc une langue sacrée. Chacune des 22 lettres de son alphabet est une manifestation de la Vibration originelle et contient, à ce titre, une énergie spirituelle.

 

                Un peu d'Histoire, maintenant...

                La cabale-tradition, dans le sens de tradition ésotérique reçue, est une voie sacrée par laquelle les doctrines les plus profondes de la mystique juive peuvent s'exprimer. Cette tradition rapporte que Moïse, après avoir reçu les Tables de la Loi sur le Mont Sinaï, préserva une partie des enseignements. Ne pouvant les livrer à "tous", il les transmit de vive voix à ceux dont il avait éprouvé les qualités. C'est pourquoi cette révélation ne se fait, en partie, que de bouche à oreille, sous le couvert du secret initiatique. En partie, seulement, car il fut nécessaire d'écrire ces enseignements pour qu'ils puissent parvenir aux générations suivantes.

                Les doctrines ésotériques furent dissimulées dans la Loi exotérique même, mais d'une façon codée. C'est pourquoi on dit qu'il y a 70 niveaux d'interprétation des textes de la Torah (le Pentateuque: les 5 premiers livres de la Bible). En effet, de nombreuses parties de la Bible possèdent, outre leur sens littéral, une signification plus profonde grâce à laquelle l'initié atteindra une Communion Intime avec Dieu. Puisqu'à l'époque où le prophète Esdras rédigeait la Torah, on savait qu'un sens mystérieux de ces textes était confié à des initiés, afin de préserver l'exactitude et la pureté de la Loi Reçue.

                La doctrine ésotérique des Hébreux tire sans aucun doute ses fondements des nombreuses Ecoles de Mystères Egyptiennes (dans la vallée du Nil, ces dernières foisonnaient). Mais elle reçut aussi les influences des philosophies que le peuple hébreu rencontra au cours de ses périples. Les racines de la cabale sont liées à l'ancienne doctrine secrète juive, mais dans le sens où nous l'entendons aujourd'hui, ce n'est qu'au XIème siècle que le nom "kabbale" apparut à travers un texte du philosophe juif: Salomon Ibn Gabirol.

                Entre 1150 et 1220, de fortes tensions culturelles et religieuses animaient le midi de la France, indépendant du royaume de France. Dans les cours féodales de langue d'Oc s'établissaient des contacts entre la culture islamique, juive (les premières colonies datent du 1er siècle après JC) et celle de la chevalerie chrétienne. La mystique d'amour des troubadours se développait et le christianisme s'effaçait devant la religion dualiste de l'église Cathare. Cette atmosphère de renouveau mystique, due aux interpénétrations culturelles, permit à la cabale de s'épanouir dans certains cercles juifs, composés aussi d'initiés non-juifs, et d'avoir une très grande influence sur les esprits de cette époque. On peut voir que si la cabale primordiale se rapproche de la religion juive, elle s'en éloignera au cours de la diaspora (70 après JC) et rebondira surtout en Occident, en Espagne et dans le sud de la France, à partir du XIIème siècle. Et avec la cabale (ainsi que les croisades), toutes les connaissances scientifiques et/ou littéraires transiteront entre l'Orient musulman et l'Occident chrétien.

                Les principaux textes sont: le "sepher ha bahir" (livre de la clarté), le "sepher yetsirah" (livre de la formation) et le "sepher ha zohar" (livre de la splendeur).

                C'est à cette époque-là que la cabale devint plus ésotérique et "universelle" au contact, voire à la charnière, des mondes juifs, musulmans, chrétiens, en s'éloignant progressivement, mais sans jamais les perdre, ni les renier, de ses origines juives et religieuses.

                A l'image de la révélation que reçut Moïse sur le Mont Sinaï, la cabale est la réception directe des énergies spirituelles. Elle libère une connaissance spontanée des lois de la nature, et le but du cabaliste est de s'ouvrir à ce flux divin.

 

                Les connaissances d'un cabaliste sont:

                - la connaissance de Dieu, de l'Etre universel, de la conscience cosmique à l'origine de tout;

                - la connaissance de l'univers, la science du macrocosme;

                - la connaissance de la vie, son origine et sa raison;

                - la connaissance de la nature (principe premier), des principes fondamentaux qui l'animent;

                - la connaissance des astres, les relations qu'ils entretiennent avec l'ensemble (des connaissances);

                - la connaissance de la Terre, sa place dans l'univers, ses cycles d'évolution;

                - la connaissance des mythes, les enseignements qu'ils renferment, et les agrégats inconscients qu'ils décrivent;

                - la connaissance de l'Homme, l'étude du microcosme, son identité avec l'univers et, enfin, l'Homme en tant que contenant et expression des éléments ci-dessus.

 

                Les règles de base du cabalisme:

                - un principe unique et éternel, seule réalité, est la CAUSE éternelle de tout ce qui est, qui fut ou sera;

                - ce principe s'équilibre par trois manifestations: deux s'opposent et se complètent, une troisième les équilibre;

                - ces trois tendances se développent en une multitude d'autres à l'infini;

                - le plan de manifestation de cette multitude est le cosmos entier;

                - l'Homme est à l'image de ce cosmos: "Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut";

                - l'Homme est soumis, comme le cosmos, à la loi d'évolution et d'involution.

 

                Toute la cabale repose sur la Torah.

                Le texte de la Loi Reçue est le support essentiel du cabaliste.

                Cette Loi est la Torah révélée à Moïse sur le Mont Sinaï.

                Constituée des cinq premiers Livres de la Bible (le Pentateuque), elle est la manifestation divine. Les Lettres, les Noms qui la forment, sont autant de liens sacrés qui unissent l'âme à son créateur. La Torah, outre son sens littéral, enferme sous forme de codes une immensité d'enseignements hermétiques. Une partie du travail du cabaliste porte sur la mise à jour de ces clefs.

                Les empreintes spirituelles occultées au sein des textes se manifestent dans les diverses combinaisons et sous les diverses formes que constituent les lettres de la Torah. 70 niveaux d'interprétations des textes sont connus par les cabalistes. Interprétations qui vont du commentaire symbolique à la mise en équation des valeurs de chaque lettre. A ce stade, on pénètre dans une sorte de mathématique de la pensée humaine.

                La sagesse divine renferme à l'état pur l'essence de tout Etre et de tout Devenir. Les lettres de la Torah primordiale sont subtiles et cachées. Le cabaliste, lui, est à la recherche de la Torah "repliée", la primordiale: la Torah qeduma. Ainsi l'étude secrète de la Torah doit mener le cabaliste d'une connaissance spéculative à une connaissance contemplative.

 

                Oeuvre du commencement et Oeuvre du char:

                Nombre des enseignements de la cabale tirent leur source, entre autres, d'une doctrine très ancienne, environ 500 ans avant JC. Dans cette période dite du second Temple, les cercles pharisaïques développaient deux doctrines hermétiques s'appuyant sur les livres de la Genèse et d'Ezéchiel. Ces doctrines portent les noms de "Maasse Bereshith" (Oeuvre du commencement) et "Maasse Merkabah" (Oeuvre du char).

                - La Maasse Bereshith développe le processus de la Création, à partir du premier chapitre du livre de la Genèse; c'est le mystère de l'histoire de la Création.

                - La Maasse Merkabah expérimente la vision du char d'Ezéchiel, comme trône de Dieu; c'est le mystère des royaumes célestes.

 

MAASSE BERESHITH :

                                                               Ensemble des doctrines sur la Création et des spéculations cosmogoniques et cosmologiques. La Maasse Bereshith est essentiellement spéculative. Elle a pour sujet central les 10 nombres premiers élémentaires qui se développeront sous le nom de "sephiroth" (voir plus loin) et des 22 lettres (consonnes - il n'y a pas de voyelles en Hébreu) que Dieu a créé tout ce qui existe. La mystique du Bereshith aspire donc principalement à comprendre comment s'est développée la substance originelle.

 

MAASSE MERKABAH :

                                                                La Merkabah était le char divin décrit par le prophète Ezéchiel tel qu'il lui apparût. La Maasse Merkabah est la mystique du trône divin, la connaissance des mystères du monde céleste. Elle est le but de la vision mystique, illustrée par toutes les formes de l'oeuvre de la Création. Ce trône céleste est placé au sommet de sept palais, habités par une population céleste hiérarchisée. L'ascèse mystique permet l'ascension de ces demeures occultes; cette expérience est appelée "la descente vers le trône". Il s'agit d'un voyage extatique où l'âme doit vaincre, dans chaque palais, l'opposition d'un portier (symbole de ses défauts). Le mystique a besoin pour cela de mots de passe, sous la forme de noms secrets et de sceaux magiques.

                La victoire sur un "portier", un "démon", ou un "ange déchu", accorde le passage d'un plan de conscience à un autre. La descente vers le trône est une expérience spirituelle de haut niveau, dans laquelle l'initié mène un combat très dur contre lui-même, mais aussi contre l'agression des gardes célestes.

                La Merkabah ne concerne pas uniquement le mystique, toute âme juive doit y progresser après la mort. On peut aisément supposer que les autres âmes aussi, depuis le XIIème siècle, en considérant le chemin beaucoup plus difficile (?). Le défunt traverse donc les différents palais et doit y vaincre ses propres tendances et peurs, sous la forme de gardiens du seuil. L'âme, en fonction de son degré d'évolution, se fixera dans un palais plus ou moins élevé. D'où l'intérêt d'apprendre à descendre vers le trône pendant sa vie physique.

 

                Au commencement, affirme la cabale, "Dieu a désiré voir Dieu". Par un acte libre et créateur, il a alors retiré le Tout absolu (l'aïn sof), l'a contracté, afin de permettre l'apparition d'un vide dans lequel allait se manifester le miroir de l'existence. Cet acte est appelé "zimzoum" (contraction). Puis de l'aïn sof or (la lumière sans fin qui entoure le vide) a émané un rayon de lumière (kav) qui s'est manifesté à dix niveaux différents. Ces dix niveaux sont connus sous le nom de sephiroth. La racine du mot hébreu sephira (singulier de sephiroth) est à la fois proche de celle du mot "chiffre" et de celle de "sphère". Les sephiroth représentent les attributs divins imbriqués dans de mutuelles relations. Les relations entre les sephiroth sont gouvernées par trois principes (voir plus haut les règles de base): les Splendeurs cachées (zazahot), qui sont:

                - la Volonté - qui maintient l'équilibre,

                - la Miséricorde - qui répand le flux de l'émanation

                - et la Rigueur, qui le contient.

                Les Splendeurs organisent les sephiroth, et elles le font selon un modèle symbolique connu sous le nom d'arbre de vie, ou arbre cabalistique. Cet arbre est l'archétype à partir duquel la Création s'ordonne. Si les sephiroth sont des attributs de Dieu, elles peuvent aussi se comprendre en termes d'expériences humaines. Elles sont la commune mesure entre le Créateur et sa Création.

                La cabale est aussi une gnose: l'Homme recherche en lui sa part de divinité. Les sephiroth sont les dix puissances de l'âme: les trois supérieures, le sekel (intellect), sont la conscience pure. Les sept autres, les Middoth (attributs), constituent les 7 forces émotionnelles de l'âme. Dans l'Homme, les Middoth sont vivifiées et rendues effectives par le sekel, ceci ayant pour résultat les états mentaux et les dispositions affectives.

                Les sephiroth portent les noms suivants, dans l'ordre d'émanation:

 

                KETER: la couronne. Sephira la plus haute, elle est le siège de la conscience pure, la lumière s'y trouve à l'état pur. Elle est l'origine de tout, le lien direct avec la divinité.

                HOCKMAH: la sagesse. La matière première, l'origine des puissances intellectuelles. Dans l'Homme elle régit l'imagination, le concept, l'intuition.

                BINAH: l'intelligence. Elle permet de comprendre les informations provenant de la conscience pure, de réfléchir, de spéculer.

                HESSED: la clémence. La bienveillance illimitée. Elle est l'ouverture et le partage. L'expansion des qualités, des facultés.

                GVOURAH: la rigueur. La restriction, l'intransigeance. L'acte de ramener à soi et de discipliner.

                TIPHERETH: la beauté. La synthèse et l'harmonie des forces émotionnelles de l'âme. L'organisation des énergies.

                NETSAH: la victoire. Elle structure l'élan d'ouverture de hessed. Permet de produire l'acte pratique qui fera réaliser l'intention.

                HOD: la gloire. Elle spécule sur l'acte pratique de netsah, le contrôle et le discipline.

                YESSOD: le fondement. La fondation sur laquelle reposent les forces émotionnelles de l'âme; si yessod n'est pas parfaitement stable, l'édifice entier ne peut se maintenir.

                MALKUTH: le royaume. La matérialisation, le support physique des forces émotionnelles. Elle est l'acte exprimé, la partie de l'iceberg que l'on voit.

 

                Les 22 lettres sacrées:

                L'alphabet hébraïque est constitué par 22 consonnes, les voyelles n'existant pas en Hébreu. Pour les cabalistes, ces 22 lettres sont à l'origine de la création du monde (souvenez-vous: "au commencement, il y avait le Verbe"...)

                Le mot hébreu pour désigner une lettre est "auth". Ce mot ne se traduit pas uniquement par le mot "lettre", mais aussi par "signe", "preuve", "symbole" et "miracle".

                Les lecteurs qui connaissent la langue hébraïque savent que c'est une de ses particularités. Les autres, peut-être, l'apprennent...

                Chaque lettre est une puissance à la fois matérielle et immatérielle. Matérielle, parce qu'elle existe et permet la communication avec le monde matériel. Immatérielle, car elle vibre dans chaque région de la création.

                Les lettres sont la manifestation d'une vibration primitive symbolisée par le YOD, la plus petite des lettres, car réduite à un simple point. Le YOD primitif est un point tournant sur lui-même, et de son expansion sont nées les autres lettres. S'unissant entre elles, les 22 lettres ont permis à toutes choses d'exister.

                Obéissant à une loi universelle précise, les 22 lettres sont partagées selon une structure bien connue des symbolistes. En: 3-7-12, c'est-à-dire, 3 lettres mères, 7 lettres doubles et 12 lettres simples.

                - Les 3 mères. Elles personnifient les trois tendances mères de la nature: l'actif, le passif et le neutre. C'est la loi de la triade: "Trois qui ne forment qu'un". Ces trois lettres se nomment: Aleph, Mem, Shin. Le neutre et équilibré est Aleph, la première lettre de l'alphabet. Le passif, féminin, est Mem, la 13ème lettre. L'actif, masculin, est Shin, la 21ème lettre. Ces trois tendances symbolisent la manifestation de l'unité qui par elles se développe en sept forces cosmiques manifestées par les 7 lettres doubles.

                - Les 7 doubles. Dans l'alphabet hébraïque, sept lettres ont deux prononciations possibles, c'est pourquoi on les appelle doubles. Pour les cabalistiques, elles existent en force (Shin) et en faiblesse (Mem). Elles symbolisent la loi de l'accomplissement parfait des agrégats du cosmos. La structure du septénaire se manifeste symboliquement par sept jours, couleurs de l'arc-en-ciel, notes de musique... Ces sept principes évoluent dans un espace-temps régi par le nombre 12, d'où la catégorie des douze lettres dites simples.

                - Les 12 simples. Elles sont appelées simples car elles n'ont qu'une seule prononciation. Ces lettres constituent la trame rythmique de l'espace et du temps sur laquelle évoluent les sept principes précédents, ceci suivant la règle des trois forces fondamentales. Elles s'associent à des structures telles que le zodiaque, les mois de l'année, un octave musical (12 notes)...

                Il faut souligner, pour terminer, que 22/7 est égal à 3,14, le nombre transcendant, rapport de la circonférence (sphère de l'espace) au diamètre du cercle.

                La cabale dit la roue des lettres (la rota).

 

                En règle générale, la cabale (la "vraie") implique une excellente maîtrise de l'Hébreu aussi bien à l'écrit qu'à l'oral et une force de volonté - et du temps - dans la voie spéculative.

 

                Résumons-nous:

                D'origine juive, la cabale est d'abord une recherche du secret de la foi. Du secret de la foi à celui du Tout, de la connaissance de Dieu à celle de l'Homme, elle se rapporte à tous les domaines de la Création. La cabale commente les textes sacrés (Pentateuque) de la religion juive. Si les non initiés ne considèrent que "l'habit" qui est le récit - et de par ce fait, ils ne se rendent pas compte de ce que cache "l'habit" - les initiés, eux, ne voient pas seulement l'habit mais le corps sous ce dernier. Et si les cabalistes juifs recherchent le sens caché dans les textes sacrés, clef des mystères de la Création, les cabalistes occidentaux, eux, se sont souvent contentés de la cabale spéculative (début XIIème siècle) à toutes fins utiles et l'ont très souvent utilisée par la suite à tous les niveaux de la Communication comme un code ésotérique. Au cours des brassages religieux et ethniques, la cabale deviendra une gnose (en Europe) - une recherche du secret de la Création, certes, mais une gnose - qui met en scène une cosmogonie dont l'Humain est un acteur à part entière, voire un collaborateur physique de Dieu.

                Si la cabale juive primordiale recherche la parole secrète de Dieu, la cabale du Moyen-Age occidental traite en plus des sciences physiques, sociales et métaphysiques de son époque, cela, jusqu'à la Renaissance (française). Ce n'est qu'à partir du XIXème siècle que la cabale resurgira - en provenance des états allemands - sous la forme, voire l'essence, d'un rituel magique très puissant. Le zohar, manuscrit du XIIIème siècle, y est pour quelque chose. Il précise la nature de l'intermonde, c'est-à-dire celle des créatures démoniaques ou "mythiques". De nos jours, l'exorcisme puise "ses pouvoirs" en partie dans la cabale, notamment du zohar.

 

 

                Voici les principaux auteurs dont les travaux se sont portés sur la cabale:

 

SALOMON IBN GABIROL (1021-1058)

 

                Poète et philosophe d'Espagne, connu aussi sous le nom d'Avicebron. Il développa des idées généralement néoplatoniciennes, auxquelles il rajouta ses conceptions propres par lesquelles il met l'accent sur une Volonté primordiale créant librement et considérée comme la source ultime de l'être.

 

ABRAHAM IBN EZRA (1092-1167)

 

                Cabaliste d'Espagne et d'Italie, il fut un grand grammairien, un philosophe et un poète. IBN EZRA fit d'importantes analyses mystiques portant sur les nombres et les lettres du Nom de Dieu. Sa cabale est mêlée d'idées pythagoriciennes.

 

ELEAZAR DE WORMS (1176-1238)

 

                D'origine allemande, il élabora une doctrine cherchant à unir une stricte adhésion à la Loi rabbinique avec la mystique cabalistique. Il écrivit des notes exégétiques sur la Bible, des commentaires sur les prières et des poèmes liturgiques.

 

ISAAC L.AVEUGLE (XIIIème siècle)

 

                Il vécut en Provence et est considéré comme le Père (en Occident chrétien) de la cabale. Il est l'auteur du SEPHER HA BAHIR. Il insiste sur la doctrine de la transmigration des âmes.

 

RAYMOND LULLE (1235-1315)

 

                C'est le premier savant chrétien à s'être occupé de la cabale. A ses yeux, c'est "l'absorption de toutes les vérités divinement révélées par l'âme rationnelle de l'Homme."

 

ABRAHAM ABOULAFIA (1240-1291)

 

                Né à Saragosse, il élabora la doctrine de la cabale prophétique. Son enseignement est principalement axé sur l'union avec Dieu par l'extase, à travers des postures du corps, des respirations et surtout les permutations des lettres du Nom de Dieu. Le disciple doit se concentrer sur une lettre, entre autres, de l'alphabet hébreu jusqu'à ce qu'il se sente inspiré par Dieu.

 

MOISE DE LEON (XIVème siècle)

 

                Il élabora une doctrine mystique de l'âme fondée sur la distinction entre les âmes végétales, animales et "raisonnables". Ses thèmes principaux sont la nature de l'âme, son état après la mort, le monde futur et la résurrection. Il est l'auteur du SEPHER HA ZOHAR.

 

PIC DE LA MIRANDOLE (1463-1494)

 

                Philosophe et savant italien, il publia dès l'âge de 23 ans ses premières thèses cabalistiques qui démontraient l'aboutissement de tous les courants de pensées antérieures dans le christianisme. Pour PIC DE LA MIRANDOLE, l'association de la pensée platonicienne et pythagoricienne donnerait la clef de la "parole perdue" de la cabale.

 

CORNELIUS AGRIPPA (1486-1534)

 

                Il traita de la magie des nombres, de l'usage des carrés magiques. Il développa les aspects "magiques" de la cabale. Il est à l'origine de la confusion entre la cabale, la numérologie, la nombrologie, la sorcellerie et l'occultisme.

 

MOISE CORDOVERO (1522-1570)

 

                Cabaliste de l'école de Safed (Palestine), il fut un grand théologien de la cabale. Il a écris, entre autres, le "Pardes Rimonim" dans lequel il développe la réalité indépendante des sephiroth entant que récipients permettant l'action de la substance divine unitaire.

 

 

 

LES MANUSCRITS PRIMORDIAUX DE LA CABALE

 

 

PENTATEUQUE

Cinq premiers livres de la Bible: Genèse, Exode, Lévitique, Nombres et Deutéronome.

 

SEPHER YETSIRAH (livre de la formation)

Il a été écris à la fin du XIème siècle. Le livre se divise en deux parties.

                I - les 32 voies de la Sagesse a pour but de décrire l'évolution de l'être en lui-même, c'est-à-dire de montrer comment l'être virtuel illimité passe à l'état d'être limité réel. Ceci par l'intermédiaire des 22 lettres de l'alphabet sacré.

                II - c'est l'étape suivante. Elle décrit l'évolution de l'être en dehors de lui-même par 10 haltes nommées Sephiroth.

 

SEPHER HA BAHIR (livre de la pureté)

Il développe la mystique des lettres, la migration des âmes, la combinaison des Noms divins, la méditation sur la création du monde et sur le mystère du char céleste.

 

SEPHER HA ZOHAR (livre de la Splendeur)

Il réunit tous les éléments de la cabale d'avant le XIIIème siècle. Il est aussi à l'origine de la cabale occulte qui apparaîtra en force au XIXème siècle.

 

PARDES RIMONIM (verger des grenades)

Ecrit au XVIème siècle, c'est un recueil cabalistique qui reprend en partie les textes précédents malmenés par la chasse aux sorcières de l'Inquisition latine.

 

 

Un texte de Thierry DELUC (C) 

   


   

 

Claire persiste et signe, après la tempête ésotérique, avec une réflexion toute personnelle sur le « miroir magique ».

 

 

Nécromancie Réfléchie.....

 

      L'utilisation du miroir est la forme la plus ancienne de divination. Une légende raconte que Pythagore aurait possédé un miroir magique dans lequel il emprisonnait la Lune afin d'y lire l'avenir comme le faisaient les sorcières de Thessalie. Grillot de Givry ("Le musée des sorciers, mages et alchimistes", Paris 1929) dit qu'à l'inverse de la nécromancie, qui n'évoque que des défunts, le miroir montre des hommes qui n'existent pas encore ou des actions futures. Pourtant, le miroir, comme la surface de l'eau, est utilisé en divination pour interroger les esprits, et la tradition littéraire islamiste fait du thème du miroir magique permettant de lire passé-présent-avenir un grand classique. La coupe de Jamshîd, le légendaire roi de l'Iran, était un miroir symbolisant le coeur de l'initié, lui-même symbolisé par un miroir (jadis en métal), la rouille en étant le pêché et le polissage (miroir) sa purification.

                Cette année, Raymond Moody vient de sortir un nouvel ouvrage qui s'annonce peut-être aussi fondamental que son célèbre "La vie après la vie" qui s'interrogeait sur la permanence d'une forme de conscience indéfinie chez des individus dont le corps physique avait été cliniquement mort pendant un certain temps et qui témoignaient d'un bref séjour dans l'au-delà (N-D-E), ce qui posait la question de la survie après la mort. "Rencontres ou l'histoire fantastique des contacts avec les disparus de l'antiquité aux plus récentes expériences" (Ed. Robert Laffont, 1993), servira peut-être désormais d'anthologie du genre aux côté des livres d'Allan Kardec. Il s'agit ici des contacts établis avec des disparus par vision  ou apparition dans un miroir, procédé utilisé depuis la plus haute antiquité, depuis que l'homme croit en la vie post-mortem et cherche a communiquer avec ceux qu'il a perdus pour les voir et les entendre encore et encore. Et les perdre un peu moins.

                Moody s'est surtout interessé aux transcommunications par les miroirs, magiques s'il en faut, dont l'origine est communément située par la gente des psychologues dans l'inconscient. Encore. Bien sûr. Et loin de toute médiumnité.

                Historiquement, et je serais tentée de dire bibliographiquement (H.Fantaisy) l'évocation des morts à l'aide d'une surface réfléchissante était pratiquée dans la Grèce Antique (à Ephyra en Epîre) dans un psychomantéum dédalique qui débouchait sur une salle des apparitions très peu éclairée, pour l'ambiance et la bonne préparation psychologique des pélerins. Au milieu de cette pièce, un chaudron de métal poli rempli d'eau attendait qu'on le fixe des yeux pour révéler une éventuelle entité défunte.

                La Bible, bien qu'elle en interdise l'usage, signale la possibilité de communiquer avec les morts, notamment dans le passage du Premier Livre de Samuel (I, Samuel, 28) où Saül consulte la nécromantienne d'Endor pour rencontrer son père:

"Samuel était mort, tout Israël avait fait son deuil et on l'avait enseveli à Rama, dans sa ville. Saül avait expulsé du pays les nécromans et les devins. Tandis que les Philistins, s'étant groupés, venaient camper à Shunem, Saül rassembla tout Israël et ils campèrent à Gelboé. Lorsque Saül vit le camp Philistin, il eut peur et son coeur trembla fort. Saül consulta Yahvé, mais Yahvé ne lui répondit pas, ni par les songes ni par les oracles, ni par les prophètes. Saül dit alors à ses serviteurs: "cherchez-moi une nécromancienne, que j'aille chez elle et que je la consulte" (...) Ils arrivèrent de nuit chez la femme. Il lui dit: "Je t'en prie, fais-moi dire l'avenir par un revenant, et évoque pour moi celui que je te dirai". (...) Le Roi lui dit: "N'aie pas peur! mais que vois-tu ?" et la femme répondit à Saül: "Je vois un spectre qui monte de la terre"  etc..

                Dans la Genèse, on apprend aussi que Joseph possédait une coupe de métal qui lui permettait la divination (genèse, 44). Le mouvement de l'eau (ou le son de l'eau tombant de la coupe) ou encore la figure qu'y dessinaient des gouttes d'huile, étaient interprêtés comme des signes, des présages. Ce mode de divination était aussi connu dans l'ancien orient. D'autres civilisations (celtes, grecs, romains, chamanes de Sibérie etc..) utilisèrent également le pouvoir réfléchissant du métal ou des liquides dans des pratiques paranormales. L'exemple plus récent (XVIème siècle) de l'anglais John Dee est célèbre, qui possèdait un miroir mexicain taillé dans l'obsidienne. Par ailleurs, Lincoln ne se vit-il pas mourir dans son miroir ?

                Les visions réfléchies peuvent être provoquées de bien des façons. Par la paraéidolie (à partir de la forme des nuages), par l'incubation des rêves pratiquées dans certains temples antiques (à effet thérapeutique, comme l'apparition au cours du sommeil d'un personnage tel qu'Esculape en Grèce), par l'hypnagogie (état intermédiaire entre la veille et le sommeil pendant lequel on peut voir une scène sans réalité objective mais perçue avec un total réalisme avant de disparaître brutalement.

                Mais les visions directement perçues dans un miroir déroutent car elles semblent tout-à-fait réelles aux sujets qui les expérimentent. La vision paraît montrer une personne qui s'y reflète vraiment comme si elle se tenait devant - ou se tenait derrière la fenêtre figurée par le cadre du miroir.  Le Dr Moody, qui avait déjà collecté de nombreux témoignages sur la question, décida en 1990 de faire l'expérience lui-même, et parvint laborieusement à entrer en contact visuel avec une vieille femme qui lui parla. Convaincu, il voulut pousser plus loin l'expérience et installa un psychomantéum dans une crique de l'Alabama, baptisé Théâtre de l'Esprit, et qui était en fait un laboratoire propre à faciliter les états de conscience altérés nécessaires à ce type de visions. Par un jeu de miroirs qui désoriente l'esprit en lui faisant perdre ses repères spaciaux et temporels, il plaçait le participant dans les conditions optimum avant de l'installer dans la salle des apparitions, très sombre, devant un miroir incliné de telle sorte que rien ne pouvait normalement s'y reflèter.

                Lorsque l'expérience fonctionnait, le miroir semblait recouvert de brouillard, puis de taches colorées, avant de montrer des scènes ou des gens qui paraissaient parfois sortir du miroir pour se mouvoir dans la salle, ou, à l'inverse, le sujet avait l'impression d'être projeté dans le miroir. Moody parle alors de conversations entre les deux mondes, auditives ou télépathiques. Il signale de rares cas de sensations tactiles, et plus rarement encore, de véritables contacts physiques.

                Dans tous les cas, l'impression de réel était totale, et l'expérience bouleversa toute l'existence du sujet.

                De tous temps, ce type de témoignage a rencontré une vive opposition, pour toutes sortes de motifs. Certains, individuellement, sont terrorisés à l'idée de ce que leur inconscient pourrait leur révéler, ou suspectent les méfaits d'un charlatanisme redouté (et redoutable !). Les religions en général se sont toujours battues pour interdire les relations des vivants avec les défunts. Les fondamentalistes catholiques de notre époque y voient d'ailleurs l'oeuvre de Satan.

                Mais, somme toute, c'est l'emprise de notre environnement technologique et de notre esprit prétendument scientifique qui nous encourage à rejeter l'usage et la foi en ces surfaces réfléchissantes, qu'on dit être les miroirs de l'âme, pourtant sources d'indications précieuses sur le contenu de l'inconscient et une meilleure compréhension  des limitations et des potentialités de l'esprit humain dans le domaine de la psychologie, de l'histoire ou de la littérature.

                De la parapsychologie aussi ?

                Ah mais ! attention !

                Ce mot fait peur !

 

Claire PANIER sc Duncan D’IRAH ©

 


 

 

Et maintenant la parole à Flesh qui nous livre une réflexion personnelle sur l’écriture et qui a souhaité que cette contribution figure dans Murmures....

 

 

 

La Forme et l'Attitude

  

par Gilles Dumay - 110 Rue d'Offémont 60150 Le Plessis-Brion.

 

 

            Avant-propos.

 

                Ce qui suit n'est qu'idées n'ayant qu'une valeur purement individuelle, n'y voyez là ni élan péremptoire, ni nombrilisme, ni autosatisfaction. Ni désir de vous mener à penser comme moi ; à chacun ses idées puisque seuls les trucs peuvent être échangés/offerts comme certains semble le croire... Et questions trucs - en dehors de la cuisine - mon bagage est maigre...

 

                1/ La forme.

 

               Pour répondre aux membre du groupe de reflexion sur l'écriture REMPARTS Noé Gaillard, Bernard Stephan : la forme n'est pas plus importante que le fond, bien au contraire. La forme n'est que l'emballage, bien entendu il convient que cet emballage tende vers une certaine perfection (relative aux capacités de l'auteur).

                En tant que directeur de publication du fanzine Destination Crépuscule (que vous connaissez, pour la plupart d'entre vous), quand je reçois des textes, ce qui m'intéresse le plus n'est autre que la thèse de l'auteur, sa faculté à mettre son imagination - sa créativité - au service de l'écriture ; car son style, n'importe quel style, est perfectible (d'où l'avalanche de trucs qu'offrent les vieux de Remparts, gentils pairs/pères que je ne saurais trop remercier). L'écrivain est un artiste ou n'est pas ; il est peintre de ses fantasmes, sculpteur de ses obsessions, premier public de sa folie maîtrisée, premier jouisseur de son enthousiasme (parfois démesuré) pour l'Autre, le Lendemain ou l'Ailleurs (notions d'évasion, rêverie temporelle, notion d'échanges). Plus la folie - la distance entre la norme et les facettes de son art - est grande, plus l'écriture est intéressante. Ensuite le style, la maîtrise de la langue, permettent une bonne énonciation, une restructuration de sa pensée pour la mettre à la hauteur d'un public plus ou moins vaste. Un bon style est un outil nécessaire et surtout pas un but, seule la vérité de l'auteur compte, seule sa réalité forte (sa perception de l'invisible) est vitale...

                Le fait qu'un texte soit parfaitement bien rédigé ne m'invite pas forcément à le soumettre à mon comité de lecture, surtout si l'écriture de ce texte est inféconde, sans message, sans idées, sans images (pour faire plaisir au Docteur Stolze). Par contre si un texte fourmille d'idées mais est mal rédigé, je n'ai qu'une envie : aider l'auteur à mettre ses idées en place et à rendre une copie lisible, qui va toucher un pourcentage honorable de lecteurs (écrire c'est séduire, parfois séduire les voyeurs, mais ce n'est que ça ; et toute séduction n'a qu'un but aimer et non être aimé). Mon boulot d'anthologiste se trouve là et uniquement là : me battre (prendre sur mon temps) pour qu'un texte qui était a priori trop imparfait ait - après réécriture - de solides chances de paraître sous une forme plus lisible qui ne trahisse en RIEN la pensée de l'auteur, aussi amateur fût-il.

                En tant qu'auteur, pour le moment, je ne me concentre pas du tout sur la forme de ce que j'écris (c'est une erreur vis à vis des critiques et du public, mais pas vis à vis de la voie que je me trace). Je traite par-dessous la jambe toute notion de style ; mon intérêt se porte plutôt sur les schémas narratifs, les constructions (que je souhaite de plus en plus complexes et pourtant non elliptiques). Je m'intéresse à l'énonciation de ma vérité, de ma perception. Je m'intéresse aux squelettes, aux infrastructures ; plus tard - dès que j'aurais maîtrisé les silhouettes de ces déjà-morts - je les affublerai de chair, nerfs et peau (d'une beauté, d'une cohésion, d'un style ; on est d'accord sur le point que l'emballage DOIT être de qualité). L'urgence me pousse à raconter des histoires, pas forcément à bien les raconter, d'autant plus que je perds beaucoup de temps à tenter de maîtriser grammaire et orthographe... Pour le moment le style vient du ventre, le schéma vient du cerveau, voilà la composante technique de l'attitude qui est mienne, un compromis... dès que j'aurais passé un certain stade dans l'architecture de l'écrit (la maîtrise d'un schéma pour un roman de plus de 800 000 signes avec non moins de 32 personnages, roman (de S.F.) en gestation qui me bloque à tous les niveaux) je plongerai à fond dans la stylistique, les micro-constructions.

 

                2/ L'attitude.

 

                Il n'existe pas un sens à ce que l'on fait - ou alors notre écriture serait franchement minimaliste - il en existe plusieurs : j'appelle ATTITUDE cette alchimie car le fond (le sens) varie d'un texte à l'autre, je dirais même plus que le fond doit ABSOLUMENT varier d'un texte à l'autre. Je me vois mal parler d'une attitude autre que la mienne... Et donc, dans mon écriture, dès qu'un texte passe les 20 000 signes (seuil où je passe d'un style aride à un style plus romanesque avec descriptions), me permettant donc de développer idées/situations/personnages, je mets en pratique mes idées.

                A savoir :

                a/ - Qu'un texte (d'une certaine longueur) n'est pas un texte si ne s'y mêlent point Eros et Thanatos. Vie et mort. Douleur et joie. Jouissance et cruauté. Masculinité et féminité. En tant qu'écrivain hétérosexuel cette dernière association antithétique est à la base de 90% de mes textes.

                b/ - Que toute histoire amène une évolution du personnage central ou des personnages principaux - s'il y a lieu. Si A est confronté à l'événement B, ou à une série d'événements, ou à un personnage (le plus souvent du sexe opposé), à la fin de l'histoire A n'est plus A, mais A', personnage sublimé, modifié en bien ou en mal, ou plus radicalement détruit (folie, mort, assimilation par un organisme ou un mode de pensée négatif).

                L'Eros - somme des pulsions de vie - ne naît (dans mes textes) qu'entre deux personnages dont certaines des caractéristiques sont antithétiques (la fusion homme/femme, pénétrant/pénétré est quasiment incontournable ; d'autant plus que l'homosexualité littéraire ne m'intéresse guère, sauf le lesbianisme physique qui est souvent un rejet de la brutalité de l'individu mâle, rejet de la pénétration et donc notion de conservation de son intégrité physique). Dans mes textes, l'antithétique relationnelle se caractérise soit par le métissage (alchimie toujours), soit par la fusion bien/mal, soit par l'opposition art/sciences, abstrait/concret, rêve/réalité. Les liaisons qui m'intéressent sont des oppositions, des collisions voires des collusions mystiques. La rencontre m'intéresse plus que la rupture (car si on pense que l'amour est le sentiment le plus fort, alors la haine est d'autant le sentiment le plus fort ; donc en parlant de rencontre, je parle - aussi - de rupture. En parlant du noir, je parle du blanc. En glorifiant les ténèbres, je renforce la lumière ; et inversement).

                Chacun de mes textes est construit sur ce principe A+B=A'+B' ou A+B=C ou A+(-A)=C ou A+(-A)=A'+B (alors que pour ces deux derniers cas le résultat devrait être égal à 0). A ne doit jamais rester A sauf s'il s'agit là de la thèse principale de l'écrit considéré ; mais attention cela revient à parler d'absurdité de la vie, de surplace et de néant. En gardant le même principe, les modifications physiques (mutilations, maladies, blessures, cicatrices, grossesses) sont toujours à lier aux modifications psychiques (l'être doit accepter que chair et esprit sont interdépendants, liés).

                Mis de côté le cas de conservation, de paralysie psychique, de blocage, de statu quo immuable ; l'évolution du personnage est forcément négative ou positive. Si l'on considère l'écrit comme un exutoire (c'est souvent mon cas), les évolutions négatives (régressions, suicides, destructions, morts violentes, folie) seront plus courantes que les évolutions positives (fusion sexuelle, évolution vers l'âge adulte, sublimation, éclairement mystique, grossesse désirée, imago psychanalytique).

 

                Peut-être ne parle-t-on pas assez de la notion de vases communicants en écriture... je me sers de l'écriture pour évacuer toute ma violence (et mes obsessions) ou au contraire je me sers d'elle pour y puiser de la sérénité, l'écriture peut-être une méditation éveillée (le but n'est plus d'être publié, d'être lu, ou d'être bien considéré (en un mot aimé) ; mais plutôt de se découvrir, d'être soi - en modifiant la vision que l'on a de soi-même on modifie le monde). Il ne faut en aucun cas s'enfermer dans une écriture positive ou négative, l'équilibre, le juste milieu doit exister, s'il n'est pas parcellaire du moins doit-il être visible sur la totalité de l'écrit ; donc alterner textes noirs et textes lumineux. En donnant aux deux penchants d'égales valeurs.

               

                Voilà l'ATTITUDE = être enfin soi (parfois en dictant au lecteur une vérité inversée, un mensonge stylé); Jean-Pierre Planque[1] dirait que c'est une approche yogique de l'écriture, de l'art en général ; je partage son point de vue. A l'instar de l'amour physique ou de la méditation, l'écriture est un élan pour toucher le divin du Monde. L'art est sacré - mystique par sa démarche - car sa finalité, quelle que soit sa violence, la récurrence des obsessions qui l'agitent, est d'améliorer le Monde, d'ouvrir les portes de la perception, d'aimer et non d'attendre d'être aimé (qui est de loin l'Attitude la plus narcissique et donc la plus vaine).

               

                Conclusion.         

 

                Toute - mon - écriture doit donc tendre vers deux choses bien distinctes : d'abord un message (le + important) ; puis une perversion des idées, des références et des images (détournement ou transposition de mythes, de citations, de modes de pensée et de poncifs).

               

Ecrire c'est crier.  

 

 Ecrire c'est mentir.

 

                Le STYLE s'acquiert par le travail, l'ATTITUDE on l'a en soi ou on ne l'a pas... Il faut désirer l'éclairement (en connaître la valeur) pour réussir à venir à lui. En fait chercher c'est déjà trouver quelque chose. La réalité n'est pas dans le regard que l'autre porte sur l'écrit, à moins que l'autre en question soit votre double... L'autre ne peut que vous aider à améliorer votre style, à sublimer l'énonciation de votre thèse (parfois en la rendant a priori invisible).

                Et le plus dangereux reste de laisser le soin aux critiques de trouver le sens (les idées, les symboles et les images) que l'on a développé dans son texte. Il est très difficile de juger ce que l'on écrit mais tout de même - à mon humble avis - il faut qu'un texte soit une espèce de dissertation avec un début, un développement, une conclusion ; et en filigrane une ou plusieurs thèse(s) dont on doit contrôler toutes les idées, dont on doit connaître tous les diverticules.

                Etre soi revient donc à percevoir ce qu'induit notre écriture.

 

                La solution reste donc de partir des idées pour arriver au texte (le nourrir) et non de partir du texte pour arriver aux idées. La pensée engendre l'écrit et non l'inverse.

                Je pense donc j'écris.

                Je construis l'Ailleurs et l'Autre pour mieux me connaître.

 

Gilles DUMAY ©

 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1]Lire son article La Comédie des Mots.